mercredi 23 janvier 2013

LA QUESTION DE LA DISTRIBUTION DU LIVRE EN CÔTE D’IVOIRE : ÉTATS ET PERSPECTIVES FACE AUX NOUVELLES TECHNOLOGIES (MOBILE, INTERNET, LISEUSE, IPAD ET E-BOOK).


En Côte d’Ivoire, le livre suit une chaîne semblable à celle de tous les systèmes (voir figure ci-dessous, filière livre) qui commence par la création puis la production, la diffusion-distribution, la commercialisation et la consommation.

La création est le lot de l’écrivain, personne qui donne naissance à l’œuvre en tant que création artistique dans un ou plusieurs genres littéraires tels que le roman, la nouvelle, la poésie, le théâtre, le récit, le conte et l’essai. A côté des œuvres de fiction, il y a des ouvrages documentaires, des monographies, des périodiques, etc. ; les auteurs sont issus de toutes les couches sociales: universitaires, professionnels, enseignants, journalistes, des personnes physiques ou morales…. Il s’agit de parler du livre ivoirien de langue française en sa totalité ou en partie. Les auteurs, écrivains, illustrateurs, "bédéistes" sont réunis au sein de l’Association des Ecrivains de Côte d’Ivoire (AECI). Celle-ci œuvre à la découverte puis à la promotion des jeunes écrivains à travers des concours de création littéraire mais aussi à l’amélioration de la situation des auteurs dans leur relation avec les éditeurs pour le respect et le paiement des droits d’auteur. Il existe des éditions à compte d’auteur, situation dans laquelle l’auteur finance lui-même les frais d’édition de son œuvre, ou des cas de commande d’œuvres par l’éditeur.
Pour ce qui est de la production, on y inclut les activités d’édition et de fabrication du livre. L’édition a connu une émergence avec la naissance du Centre d’Edition et de Diffusion Africaines (CEDA) en 1961 et l’ouverture d’un bureau à Abidjan des Nouvelles Editions Africaines (NEA) qui deviendra Nouvelles Editions Ivoiriennes (NEI)  en 1992. Ces deux maisons d’édition vont contribuer à l’édition des livres scolaires résultant du programme "école et développement" adopté par le gouvernement ivoirien. Dans les années 90 vont naître plusieurs maisons privées d’édition regroupées aujourd’hui en Association des Editeurs Ivoiriens (ASSEDI) créée en 1998 et initiatrice du Salon International du Livre d’Abidjan (SILA). Mais la prédominance du secteur informel dans l’univers du livre rend difficile l’exercice du métier. Aussi, vu la faiblesse du maillon distribution, les éditeurs se chargent eux-mêmes d’acheminer les livres à la commercialisation.
 Après l’édition c’est la fabrication du livre avec le technicien prépresse qui traduit l’ensemble des personnes qui interviennent dans l’impression du livre. Le prépresse s’organise autour du prépresse traditionnel, du prépresse assisté par ordinateur, la prémaquette, la mise en page, le montage, la recherche, le traitement de l’image et les films. La première imprimerie à voir le jour en Côte d’Ivoire fut l’imprimerie nationale, mais aujourd’hui de nombreux imprimeurs du secteur privé ont vu le jour pour la fabrication des « 7 sept millions de livres imprimés chaque année » (rezoivoire.net, 2008) mais qui accomplissent pour la plupart, des travaux de villes (cartes de visites, calendrier,..). En sus, les coûts de fabrication élevés du livre obligent certains éditeurs à se tourner vers des imprimeurs étrangers notamment en France, en Italie, au Maroc, en Tunisie et au Liban. Ce maillon qui implique des machines à fort potentiel industriel, est très peu développé d’où la petitesse de la taille du marché du livre en Côte d’Ivoire. Il en découle un certain nombre d’entreprises exerçant dans l’informel.
La distribution-diffusion du livre, est une activité exercée par très peu d’acteurs du livre. On pourrait même dire que le maillon de la distribution du livre est quasi-inexistant en Côte d’Ivoire. Seul l’éditeur NEI-CEDA dispose d’un groupe de diffusion dont l’activité consiste à propager le plus largement possible les ouvrages en fonction du public cible. On considère "édipresse" comme l’unique diffuseur, cependant, cette société est beaucoup plus axée sur la presse locale et internationale, le livre ne représentant qu’une part très réduite de son activité. Cela explique la faiblesse de la production nationale et le marché se voit investi en grande majorité par le livre importé. Après sa fusion avec SALIPACI, la Librairie de France devient un distributeur dont le monopole reste de fait sur ce maillon.
Acteur de la promotion du livre à côté des médiateurs du livre, le libraire assure la commercialisation du livre en proposant une diversité d’ouvrages à un public ou une clientèle. Le métier de libraire s’exerce  en principe dans un espace spécifique, convivial, structuré, lumineux ; c’est la matrice du concept de librairie. Les libraires ivoiriens sont regroupés au sein du Collectif des Libraires Professionnels de Côte d’Ivoire (CLPCI) en vue de la défense de leurs intérêts et de la promotion de leur profession. On note cependant que le livre circule de façon inégale entre les différentes zones de la Côte d’Ivoire ; à cela s’ajoute la grande présence des "librairies par terre" ou "librairies au poteau" et des librairies ambulantes qui connaissent du succès en raison de leur proximité aux populations et du prix de revient moins élevé, des livres qu’elles offrent.
A la fin de la chaîne se trouvent les consommateurs parmi lesquels les bibliothèques et centres de documentation, acteurs essentiels de la chaîne qui constituent des points de rencontre privilégiés entre le public et le livre. Depuis les indépendances et même bien avant, la Côte d’Ivoire a connu des bibliothèques pour ensuite bénéficier du soutien des organisations internationales dans le cadre de projets d’action culturelle (PARMEN, PADEC,). Mais les problèmes infrastructurels et de ressources humaines, sans oublier la situation que traverse actuellement le pays rendent difficile le maillage du territoire national en bibliothèques. Comme consommateurs, il y a aussi les établissements d’enseignements car, le manuel scolaire représente les 70% de la production éditoriale en Côte d’Ivoire. Depuis le préscolaire jusqu’au supérieur, c’est une clientèle captive qui procure à l’industrie du livre l’essentiel de ses revenus. On n’oublie pas les grandes surfaces et les ménages qui, eux, achètent le livre quand bien même c’est en quantité réduite. Par ailleurs, la situation que traverse le pays rend le pouvoir d’achat faible quant à acquérir des livres.
On peut donc parler en Côte d’Ivoire d’une chaîne du livre aux maillons perceptibles avec une prédominance du secteur informel. On note aussi la faiblesse de la technologie, des investissements, du marché et de la réglementation. C’est une filière dont le maillon faible est la distribution-diffusion.

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